Sur papier journal (Loupio d'amour <3)

-Meggie, tu m'écoutes?

Je hochai vaguement la tête, ce qui voulait dire que j'avais pas écouté un traite mot de ce qu'elle avait dit. De toute façon, ça ne M'intéressait pas. Je ne m'étais jamais très bien entendue avec ma mère. Ce n'était un secret pour personne. Alors être enfermée seule dans une voiture avec elle, ça ne m'enchantait pas vraiment, mais s'il fallait en plus qu'elle blablate sur le bonheur de notre nouvelle vie à deux, c'était à se tuer. Surtout que ce changement, je n'en voulais pas. Franchement, elle avait l'air vraiment trop gaie après tout ce qui venait de se passer, comme si elle était contente que papa soit mort. Depuis qu'on avait reçu la nouvelle, je ne l'avais jamais vu pleurer, elle semblait même très heureuse. Un peu comme si elle avait enfin réussi à se débarrasser d'une vieux caillou dans son soulier. Je savais qu'elle en avait mare de la vie qu'il avait choisie, mais malgré tout, c'était quand même mon père, elle aurait pu penser un peu plus à mes sentiments. Quand elle avait appris la nouvelle, elle avait simplement hocher la tête et déclaré que cela devait bien arriver un jour ou l'autre. Notre relation est devenue pis que catastrophique à partir de ce jour-là. Elle, dans tout ça, ne semblait rien remarquer. Vraiment, j'avais du mal à croire que j'étais sa fille. Savoir que papa ne rentrerait plus jamais à la maison, ça me rendait incommensurablement triste. C'était comme si tout mon monde venait de s'écrouler autour de moi. Comme si je n'en avais pas déjà assez sur les bras comme ça. Il m'était arrivé quelques fois d'en vouloir à mon père d'être mort. Je ne comprenait pas pourquoi, et encore moins comment, il avait pu se laisser tuer alors qu'il savait très bien que j'avais encore tellement besoin de lui.

-Tu ne peux pas arrêter un peu avec ton allure morose et sourire un peu? C'est vraiment lourd à la fin, et puis, ça serait bien que tu aies bonne mine pour renconter Benoît. Il a vraiment très hâte de te rencontrer tu sais?

Benoît? Qui c'était celui-là? Pourquoi y avait-il soudainement un Benoît dans le décor? Des craintes se formèrent rapidement dans mon esprit. Si jamais elle s'était trouvé un... petit ami... Juste y penser me donnait la nausée. Comment pouvait-elle seulement songer à se remettre en couple après seulement deux mois? Pour moi, il s'agissait de haute trahison. Et puis, elle le savait, papa était tout pour moi. Comme quoi elle ne comprenait pas mes sentiments. Ça me rendait folle de devoir vivre seule avec elle et peut-être son stupide Benoît. Au moins, il ne me restait plus que quelques temps avant de partir vivre ma propre vie. J'avais encore plus hâte d'y aller, d'avoir mon propre appartement où ses Benoît ne pourraient pas venir voler la place de mon père. Il était absent depuis longtemps, j'avais à peine reçu quelques lettres de lui, mais c'était mon héros à moi, rien ne pouvarrait le dévalorisé à mes yeux. J'aurais bien ris de celui qui aurait essayé de le faire. Une vraie perte de temps.

Au final, mes soupçons étaient confirmés à la différence que Benoît n'était pas un nouveau petit ami: il fréquentait ma mère depuis longtemps déjà. CE qui me donna des raisons supplémentaires d'haïr ce type. D'ailleurs, cela détériora ce qu'il restait de ma relation avec ma mère. Je n'arrivais pas à croire qu'elle ait pu trahir papa comme ça. Si seulement il n'était pas parti... Peut-être que ma mère l'aurait quand même quitté, mais au mons, j'aurais été avec mon père. C'était le seul qui comprenait mes idées et qui m'appuyait dans mes rêves. Ma mère elle, elle ne voyait pas d'intérêt dans mes idéaux. Elle était assez décourageante même. Elle ne voulait pas entendre parler de mes propres choix, de la carrière que je prévoyais. Elle m'en voulait déjà pas mal de ne pas être allée en Science Nat. Elle ne voulait pas comprendre que je ne voulais pas être médecin même si j'avais les notes pour le faire. Faire un gros salaire. C'était ça son idée du bonheur, être riche. Atteindre ses rêves n'était que secondaire. Heureusement que j'avais mon caractère, autrement j'aurais été très malheureuse.

À 24 ans, je vivais seule et loin de ma mère. Elle habitait quelque part avec son Benoît à la noix. Je ne l'appelais jamais et je ne la voyais pas non plus. Nous avions coupé les ponts depuis longtemps. Enfin, ça venait surtout de moi. Durant l'année, de bon départ, ma mère tenta quelques fois de me contacter. Elle avait souvent voulu que j'aille la voir le samedi soir pour le dîner. J'avais toujours refusé. Je détestais la voir avec ce type qui prenait la place de mon père et je ne voulais surtout pas rencontrer son fils. À mes yeux, frayer avec ces gens, ce serait trahir mon père. Je m'étais jurée de ne jamais parler au fils du parasite, le mal étant déjà fait avec celui-là même. Autorité maternelle oblige. En tant que journaliste de bas étage, tout juste débutante, je ne peux pas dire que mon emploi était fort intéressant. J'aimais mon métier, mais en même temps, je ne voulai pas passer le restant de mes jours à couvrir des évènements locaux. Je voulais faire découvrir le monde, faire bouger les choses. Ce m'était pas en écrivant un petit trente lignes sur la récolte des médailles du cluv de patinage artistique de Blainville à Pierette-Vaillancourt que ça allait se faire. Je voulais voir sur place ce qui se passait et dénoncer les grandes injustices de ce monde.

Alors, quand mon employeur me convoque dans son bureau, étrangement, j'espérais que c'était pour me muter quelque part ailleurs, je ne sais pas, peut-être dans une chronique plus intéressante. Ce n'était pas ça du tout. J'étais licensiée. Récemment, les choses allaient plus ou moins bien pour la dépêche et les rentrées d'argent étaient moins bonnes. Il fallait couper des postes et étant la plus jeunes des rédactrices, ave le moins d'ancienneté, c'était moi qui se voyait rayée de la carte. J'avais la journée pour vider mon bureau. Assez anéantie, je ne traînai pas pour paqueter mes choses. Sans ce métier, qu'est-ce que j'allais faire? Mes chances d'obtenir un avancement étaient moindre, voir même nulles. Je voyais déjà ma mère me regarder avec ce sourire qui voulait dire: qu'est-ce que je t'avais dit? Même si elle n'était pas du genre à le penser, je ne lui en toucherais pas un mot. Je trouvais bien un job facile en attendant de pouvoir pratiquer mon métier. Ce qui était embêtant, c'était que je voyais mal où je pourrais trouver un emploi à cette période de l'année. Une affaire qui tombait assez mal comme je venais de décharger mon compte en banque de quelques cinq cent dollars pour acheter mon nouveau portable. Non, mais quel merdier!

Les jours qui suivirent, je profitai de mon temps libre infini pour faire du ménage dans mes affaires. Je n'avais pas encore la tête à chercher un nouveau travail. L'échec du dernier était encore trop cuisant. Ainsi, plutôt que de faire des plans sérieux comme l'aurait dit ma mère, je formulai plutôt un nouveau projet. C'était un peu fou, mais j'étais assez décidée. Il était trop tard pour reculer: j'avais déjà résilié le bail de l'appartement. Dans une semaine, je me pointais à l'aéroport et prenais le premier billet disponible qui m'emmènerait à l'étranger. Sans mandat, ni supérieur, je me rendrai sur place. Je me monterais un recueil d'articles. Et je ne reviendrais que lorsque mon compte de banque serait complètement asséché. Il ne serait pas vidé rapidement, j'y veillerais bien. Mon père avait bien réussi. Bon il n'était pas complètement seul pour l'aventure, mais c'était tout comme. Enfin, maintenant que c'était décidé, je me sentais le coeur plus léger. Il ne me restait plusqu'à fairem on pack-sac et dire aurevoir à mes connaissances, c'est-à-dire la caissière du Tim Horton au coin de la rue. Je ne m'étais pas vraimen liée avec les gens.

La veille de mon départ tant attendu, je décidai d'aller profiter d'un bon beigne au Tim avec un chocolat chaud. Lke combo n'était pas trop cher. De toute façon, déguster une rosette au miel et un chocolat chaud est un plaisir qui n'a pas de prix. Et c'était tellement calme dans le petit restaurant à 21h00. Je pouvais prendre tout mon temps pour savourer et lire mon roman. Rien n'estmieux que cela à mes yeux, après mon métier bien entendu. Vous pouvez alors sûrement comprendre ma contrariété quand quelqu'un vint me déranger. En m'appelant par mon nom complet. Margueritte Desjardins. Sympah non. Comme nom, on avait fait mieux. Margueritte, c'est déjà un vieux prénom de vieille matante. Après, avec le nom de famille, ça donnait l'impression que j'étais une bonne petite fleur qui poussait sagement dans son carré de jardin. Au moins, ma mère n'Avait pas pensé à m'appeler Asclépiade comme ma grand-mère. Enfin, on ne savait pas à qui on s'adressait en tout cas.

-Désolée, mademoiselle Desjardins s'est absentée. Vous pouvez toujours laisser un message. Enfin, essayer. On m'a programmé avec une mémoire sélective pour que je puisse supprimer les messages indignes d'intérêt.

Un homme était assis dans ce même Tim Horton à une table à l'écart, et sirotait un café. Il avait une allure sympathique et pourtant un peu imposante. Cet homme très charismatique dégageait en effet un petit quelque chose qui imposait le respect, malgré qu'il soit tout ce qu'il y a de plus attachant. Quand on le connaissait bien, il était des plus sympathiques. Il avait assez belle allure, courts cheveux déjà gris argentés malgré son âge pas si avancé que cela, et yeux bleus gris vifs derrière de petites lunettes de lecture. Il lisait actuellement le journal, s'attardant particulièrement sur le dernier article de son meilleur journaliste. Le top du top. Il s'estimait fortement chanceux d'être son patron, sachant bien qu'à la moindre occasion, on pourrait essayer de le recruter, de lui offrir meilleur emploi ou un meilleur salaire. Mais il aimait bien croire que le jeune homme aimait travailler pour lui et se plaisait assez dans ce travail pour ne pas trop considérer les autres offres d'emplois.

Il releva les yeux de son journal le temps de prendre une gorgée de café, puis promena son regard autour de lui dans le Tim, pour changer un peu et détendre ses yeux, qui étaient restés fixés depuis longtemps sur le journal, élément plus rapproché de son visage qui nécessitait un travail important de ses yeux pour faire le bon focus. Déjà qu'il avait besoin de ses lunettes pour corriger le-dit focus... C'est alors qu'il remarqua une demoiselle installée à une table non loin de lui. Une demoiselle qui lui disait franchement quelque chose. Il se rappelait bien l'avoir déjà vue quelque part, d'ailleurs, son nom lui revenait en tête bien qu'il ait oublié où il l'avait déjà aperçue. Margueritte. C'est bien cela ? Oui. Mademoiselle Desjardins, oui, il avait déjà lu quelques-un de ses articles à l'occasion. À ce qu'il avait pu apprendre elle avait été licenciée. Entre employeurs, il arrive que ça se parle, voyez-vous. Il avait eu vent de certaines informations, notamment le renvoit d'une jeune journaliste qu'il avait trouvée assez prometteuse. La curiosité l'emporta, il se leva de table pour prendre la direction de celle de la jeune fille.

En prononçant son nom, il fut un peu surpris de la voir lui répondre de la sorte, mais alors que certains auraient pu se sentir insultés d'une telle réplique, il afficha un franc sourire qui donna à son visage une allure fort sympathique. Il y avait quelque chose en cet homme qui mettait en confiance.

- Très bien, très bien... Je crois que je vais m'essayer à laisser un message. J'ose espérer que mademoiselle Desjardins le conservera en mémoire, je crois fort que cela risque de l'intéresser. Je me présente, je suis X (La flemme de lui donner un nom, en plus c'est un pnj xD), je travaille avec des journalistes de renommée. J'ai eu vent de la perte d'emploi de mademoiselle et aimerait bien lui faire une offre. Je suis actuellement à la recherche d'un ou une nouvelle employée et après avoir eu un aperçu de l'écrire de mademoiselle, je crois qu'elle pourrait avoir le talent que je recherche. Si cela lui plait, s'il vous plait qu'elle me fasse part de son avis, le plus tôt serait le mieux.

(Hum hum. Mettons que c'est bon xD)

Journalistes de renommée? Offre d'emploi? Ces quelques mots furent assez percutant pour que j'y trouve intérêt. Un large sourire s'accrocha à mes lèvres: trop bien! Toutefois, je réprimai rapidement ce sourire et fronçai les sourcils, l'air songeur. Et mes projets de départ? Tout avait déjà été prévu. Il était hors de question de retomber en bas de l'échelle, à couvrir des évènements mineurs qui n'intéressaient personne. Oh que non! J'en avais assez fait! Trop longtemps, je m'étais pliée et ça ne faisait plus partie de mes projets que d'attendre. Il me fallait quelque chose de percutant. Quelque chose qui montrerait bien à tout ces éditeurs de journaux que je savais comment informer un public, peu importe le type de nouvelles dont il s'agissait.

-Meg à l'appareil. C'est très gentil à vous, mais je pars en voyage demain dans un but d'observation humaine pour pondre un recueil d'articles. Les articles de bas-étage, c'est fini.

Elle détourna la tête et croqua une grosse bouchée dans sa roussette au miel chérie.

L'homme souleva un sourcil à l'annonce de ce projet. C'était en effet quelque chose d'assez intéressant, mais une simple chose le chicotait. Loin de lui l'idée de se montrer trop insistant, mais il croyait qu'elle se méprenait sur son identité et le genre de personnes avec lesquelles il travaillait. Plutôt que de lui annoncer la chose directement, il sourit tout simplement et hocha la tête. Il aimait bien prendre quelques manières plus détournées, ça en valait souvent le coup, de voir la tête des gens lorsqu'ils comprenaient enfin ce qu'il voulait dire.

- Fort intéressant... Et quelle serait votre première destination ? Je pars justement bientôt pour l'Europe, je dois suivre mes journalistes voyez-vous, j'aime bien être au milieu de l'action. Et puis, même Chad Tremblay a parfois besoin d'être un peu supervisé...

Chad Tremblay. Qui ne connait pas Chad Tremblay ? Tout ceux qui désirent se lancer dans une carrière dans le journalisme ou ce genre de choses connaissent ce jeune homme. Celui qui écrit des articles incroyables avec un grand talent, celui qui voyage souvent pour aller visiter toutes sortes d'endroits et être dans le feu de l'action, voir comment se déroulent les choses, pour mettre plus d'intensité dans ce qu'il écrit. Celui qui se charge des grosses affaires internationales... Ouais. Tout le monde qui s'intéresse un tant soit peu connait Chad Tremblay. L'homme toisait toujours la jeune fille avec un sourire, attendant de voir comment elle prendrait la chose.

Chad Tremblay? Tiens, voilà qui rajoutait de l'intérêt. Alors comme ça, monsieur était le supérieur de Chad. Intéressant. Voilà ce qu'il voulait dire par journalistes de renommée. Comme toute bonne journaliste, j'avais lu ses articles, ma foi fort intéressants. J'admirais même qu'il se soit rendu si haut aussi jeune. La plupart du temps, les journalistes atteignait ce niveau de reconnaissance beaucoup plus vieux. Enfin, je n'étais toutefois pas tellement curieuse de le rencontrer. Les personnes qui ont du succès aussi rapidement m'irritent profondément. C'est comme s'ils avaient été plus intelligents comme moi et su où trouver exactement leur place. Ce que je n'avais pas découvert encore.

-Oh je vois. En fait, je n'ai aucune idée d'où je vais. Le premier vol qui m'emmène ailleurs, peu importe où c'est. J'ai pour mon dire qu'il y a quelque chose à découvrir où qu'on aille. Vous saluerez Chadounet de ma part.

Je me retins de tirer la langue. Ça aurait été un peu grossier. Et là, j'avais vachement envie d'accepter, mais jamais je n'aurais osé faire volte-face comme si je le suppliais de me prendre finalement. stupide tête de cochon...

L'homme avait entreprit d'enlever ses lunettes de lecture et les glisser dans un étuis. Tout en rangeant celui-ci dans sa poche, il ne pu retenir un léger rire. Cette fille avait du caractère, et ne se gênait pas pour dire ce qu'elle pensait. En plus, elle ne flanchait pas à la simple idée de rencontrer quelqu'un de renommée, quelqu'un au talent remarquable. Eh bien. Tout un spécimen...

- Chadounet ? Je lui ferai part de votre salut. Je ne peux cependant vous garantir qu'il appréciera le surnom. C'est bien dommage, certes, car j'aurai espéré que le fait de passer des articles sur quelques petites affaires locales aux articles d'évènements internationaux vous intéresserait, mais comme cela semble être plus ou moins le cas... Après tout, comme on dit, un homme s'essaye... Puis qui ne tente rien n'a rien. Je suis désolé si je vous ai dérangée alors. Si jamais vous changez d'idée...

Il sortit de la poche de sa veste une petite carte comprenant notamment son nom, un numéro de téléphone et l'adresse du bureau où il travaillait, et la glissa sur la table en direction de la jeune fille. Il se leva alors de la chaise où il avait prit place.

- Je vous souhaite un bon voyage, et bonne chance, dans ce cas. Oh ! Et je ne m'offusquerai pas si vous effacez mon message de votre répondeur.

Il eut un dernier sourire à l'intention de la demoiselle et prit la direction de la porte du Tim. Il ignorait si elle ferait quoi que ce soit pour le rattraper, si elle le rappelerait, ou alors si elle viendrait au bureau. C'était quelque chose d'assez courant, ça arrivait assez souvent qu'une personne comme ça change d'avis à la dernière minute. Mais bon. Avec cette jeune femme, il s'attendait à toute éventualité.

C'était justement pour ça que j'avais dit Chadounet. Il n'y a pas de surnom plus horrible. Ça fait vieille matante gateuse qui a la gale et qui bave devant son neveux chéri. Enfin, je n'étais pas encore galeuse, du moins, je ne le croyais pas. Bref... Après, si ma fierté m'empêchait de le supplier de me prendre, elle n'avait aucun mal à accepter la carte qu'il avait déposé devant moi. Avec son nom. Monsieur Ixe (à prononcer X, mais ça faisait plus classe Ixe). J'attendis donc paisiblement qu'il soit sorti et qu'il ait eu le temps d'avancer de quelques pas avant de prendre mon téléphone portable. Une antiquité que j'aimais bien. Je composai le numéro sans tarder et ne pris même pas la peine de saluer avant de demande:

-Où est-ce que vous m'envoyez?

L'homme avait à peine eu le temps de regagner sa voiture et s'installer au volant que son téléphone vibra dans sa poche. Oui, il lui avait donné le numéro de son portable. Enfin, celui qu'il utilisait pour le travail. Il avait aussi son cellulaire personnel.. Enfin bon. Il ne démarra pas la voiture, sortant simplement le cellulaire, l'ouvrant et le portant à son oreille. Il ne fut pas du tout étonné en reconnaissant la voix qui s'adressa à lui sans même le saluer.

- Eh bien... Vous avez fait vite mademoiselle Desjardins.

Il y eut un court rire, puis il reprit en pianotant distraitement sur le volant du bout des doigts:

- Pouvez-vous nous rejoindre à l'aéroport de la ville demain à 14h ? Nous prenons l'avion pour Paris, de là nous verrons notre prochaine destination. Je vous propose de faire ce voyage avec nous, vous y rencontrerez... - il marqua une pose, reprenant après un sourire malicieux que la jeune fille ne pu voir - Chad... Et vous pourrez vous familiariser avec... tout ce qui touche le boulot. Disons que c'est différent que ce que vous faisiez comme travail avant... Très semblable, mais pourtant différent. Je peux donc compter sur vous ?

Si je pouvais être à l'aéroport demain? Quelle question! J'y allais déjà de toute façon. Bon, bien sûr, mon plan de départ était de partir le matin, assez tôt. bah, tôt ou tard, c'était mieux que jamais, alors je m'en fichais bien de l'heure. 14h00, ça m'allait aussi bien que minuit ou midi. Quant à savoir que ça serait différent, je n'en doutais pas. Ça allait être palpitant. En tout cas, plus que les revues sur glace... Néanmoins, j'espère qu'il ne me sous-estimait pas un brin...

-Pas de problème. Ciaodou Patron!

C'était pas tellement poli, mais j'avais déjà raccroché. Au pire, il me verrait demain. J'engouffrai les dernières miettes de mon beigne, calai ce qui me restait de chocolat et rentrai chez moi, bien satisfaite de ma journée plus productive que prévue au final.

Il n'eut pas le temps de dire un seul mot de plus, que le "bip bip bip" du téléphone lui annonça que son interlocutrice avait coupé la communication. Il éloigna le téléphone de son oreille, lui jetant un regard un peu perplexe. Tout en démarrant, il ne pu s'empêcher de sourire en repensant à cette drôle de fille aux manières quelques peu surprenantes. Restait à savoir comment "Chadounet" prendrait la nouvelle. Il ne lui parlerait certainement pas du surnom en tout cas, ça ne commencerait pas leur relation sur de très bonnes bases...

Il garda le cellulaire en main, composant machinalement un numéro et lançant dès que la demoiselle répondit:

- Un billet de plus pour le vol de demain, 14h, pour Paris...

Le lendemain, une demi-heure à l'avance, on pu rerouver l'homme installé avec ses bagages, assit dans l'aéroport, consultant régulièrement sa montre du regard. Il guettait l'arrivée de la jeune fille, se demandant si elle serait ponctuelle. Lui avait l'habitude d'être assez en avance, mais il attendait de ses employés qu'ils arrivent au moins à l'heure. Il avait là l'occasion parfaite d'évaluer le sens de la ponctualité de la jeune fille.

L'avantage de ce genre d'expédition, c'est que tu es en continuel apprentissage. J'avais déjà donné tout ce que je ne pouvais pas emporter à des oeuvres de charité. Du coup, il y avait peu à mettre dans mon bagage. Juste de quoi me vêtir et mes outils de travail. Enfin, je n'en avais pas beaucoup de toute façon. C'est donc avec un sac de grosseur bagage de cabine que je pénétrai dans le taxi qui m'emmènerait à l'aréoport. Légèrement impatiente à l'idée de partir, j'étais arrivée une demi-heure en avance. J'avais passé une dizaine de minutes à flâner, puis je me suis mise à chercher mon nouveau Patron. Histoire de ne pas être en retard mal paraître avant même d'être partie. Enfin, j'étais assez nulle pour trouver les gens. Une pancarte avec mon nom dessus aurait été appréciée.

-Bordel, lâchai-je en regardant ma montre.

Je n'avais que deux minutes pour arriver à bon port, lieu à la location inconnue.

M'ouais. Il était plutôt mal placé pour parler de ponctualité et de rechercher cette qualité chez la jeune nouvelle alors que même son meilleur journaliste n'était pas foutu de se pointer à l'heure. Il balaya les alentours des yeux. Bon sang. Mais qu'est-ce que Chad faisait exactement !? Peut-être qu'il aurait dû s'arranger autrement, passer le prendre ou quelque chose comme ça... Il soupira, jetant un énième coup d'oeil à sa montre...

De mon côté, j'étais assez pressé. J'avais bien essayé d'être à l'heure, mais j'étais resté coincé dans le trafic en m'en venant, et comme si ce n'était pas suffisant, il y avait eu un accident monstre sur le chemin que j'avais emprunté, me ralentissant encore plus. Bref, j'étais déjà à la dernière minute, alors quand j'arrivai à l'aéroport, je dois dire que j'étais pressé. En passant rapidement, j'arrivai au coin d'un mur et faillis me heurter à une demoiselle, dans mon empressement. Je soulevai un sourcil, prenant quand même le temps de m'excuser:

- Pardonnez-moi...

Je jetai un coup d'oeil à ma montre, écarquillai les yeux et lâchai tout juste avant de reprendre mon chemin d'un pas rapide:

- Oh bon sang... M'sieur Ixe va me tuer !

Ouais, j'errais assez nerveusement, craignant qu'on ne parte sans moi. Cette idée de flâner un peu aussi... Mais bon... Je n'étais jamais allée à l'aréoport avant. J'avais bien le droit de vouloir explorer un peu. Et là, déjà que j'étais vraiment juste, au bord de la crise d'anxiété... euh non. Vraiment pas. En fait, je me la coulais relax. Tranquille. Au pire, je ferais comme j'avais dit au départ. Le premier vol disponible. Tant pis pour m'sieur Ixe. Il se passerait de mes talents. Bref, je me faisais cette réflexion quand une tête de singe failli me percuter avec violence.

-Espèce de sale co...

J'avais bien envie de lui bousiller la figure, mais un petit mot retint très vite mon attention.

-Attah, toi le type, t'as bien parlé du Patron, M'sieur Ixe? T'sais où il est?

Je lui ai attrapé le bras, au cas où se reconnaîtrait pas. après tout, des types, il y en avait partout.

Je m'arrêtai brutalement en sentant une main retenir mon bras. Bon, quoi encore ? J'étais infiniment pressé là, je n'avais pas que ça à faire d'arrêter toutes les deux secondes pour discuter avec les gens. Je me tournai, faisant face à la demoiselle que j'avais faillis percuter. Le patron ? Elle l'avait appelé le patron ? Bon. Une nouvelle ? Ça c'était surprenant. Elle avait l'air plus jeune que moi, mais si le patron l'avait recrutée, elle devait avoir du talent. Bah. Le problème, c'est qu'elle me retardait, avec tout ça.

- Ouais, il s'installe toujours à la même place, je sais où le trouver. Si tu veux m'suivre alors dépêche-toi. Si j'arrive une seule seconde en retard, il va encore m'engueuler. C'est pas de ma faute, moi, si le temps passe trop vite ! C'est encore bon que j'arrive à remettre mes articles à temps...

J'avais repris ma marche en marmonnant les deux dernières phrases plus pour moi-même qu'à l'intention de la demoiselle, m'assurant de brefs coups d'oeils qu'elle me suivait alors que me frayais un chemin jusqu'à atteindre l'homme qui était installé sur un banc. Avec mes trois secondes de retard, ce n'était pas si mal. Je m'efforçai de sourire d'une manière tout à fait irrésistible, sachant que cela ne manquait pas de le faire rire. À cause de ma stupidité, vous voyez ?

- Tiens, te voilà toi... Oh ! Tu as déjà fais la connaissance de mademoiselle Desjardins à ce que je vois... !

Roh, mais il pouvait pas être plus poli ce mec à la tête qui me disait bien quelque chose? Enfin bon. Je n'avais pas été tellement mieux en fait. Mais, c'est pas pareil. Les respects dus à une fille reste malgré son impertinence. D'ailleurs, c'était ce qui faisait mon charme, on me le disait toujours. Enfin, au moins, il savait où il allait lui.

-C'est que vous êtes pas facile à trouver en fait vous... Enfin, j'aurais dû demander hier aussi. Bref, bonjour!

Je souris avec ce drôle d'air qui était le mien.

Un rire échappa encore une fois à l'homme. Il n'en avait décidément pas fini avec ces deux-là. Déjà que j'étais toujours à la dernière minute, maintenant il en avait une deuxième comme ça sur le dos. Après avoir prit le temps de saluer la jeune fille, il fit signe aux deux autres de le suivre et s'apprêta à monter dans l'avion. Le départ était pour bientôt, après tout. Bref. Le temps de passer pour enregistrer les bagages, tout le tralala habituel, ils purent monter dans l'appareil. L'homme jeta un coup d'oeil dans ma direction.

- Du côté du hublot, Chad ?
- Comme d'habitude.

Un sourire étira mes lèvres, donnant à mon visage déjà, je dois le dire, sublime, une touche très agréable. Je m'apprêtais à prendre place proche du hublot, mais me ravisai au dernier instant, me tournant vers Meg.

- ... À moins que la demoiselle ne préfère avoir cette place de choix.

Oh! Je le savais bien que sa petite tête ne m'était pas inconnue. C'était Chadounet. Super! Je pensais par contre qu'il était déjà sur place quoi... Enfin, ça ne changeait pas grand chose. Du moment qu'ils m'emmenaient avec eux.

-Nah, c'est bien gentil, meuh j'aime mieux le côté de l'allée. Comme ça, si on s'écrase, je suis la première à me sauver. Par contre, si on se fait attaquer de l'intérieur, c'est moi qui meurt en premier. Enfin, rien de tout cela n'arrivera, mais l'allée est un terrain d'observation assez intéressant. Mais, peut-être que vous préféreriez que je prenne le milieu, ajoutai-je en regardant monsieur Ixe.

Et ciao le hublot. Moi, avoir le vertige. Moi pas aller à côté de petite fenêtre d'avion. En fait, le milieu, ce n'était pas si mal non plus. Juste pas le hublot. Enfin, du côté allée, j'aurais pu observer le peuple. C'est un exercice passionnant et instructif. On peut deviner tellement de choses.

Je ne pris pas la peine d'argumenter, ça me convenait parfaitement qu'elle préfère s'installer du côté de l'allée puisque le plus près du hublot était la place que j'adorais le plus. Je m'installai donc confortablement dans mon siège, Monsieur Ixe prenant place à mes côtés pour laisser le siège sur le bord de l'allée libre pour la jeune file. Bien que mon but premier n'était absolument pas de me moquer ou quoi que ce soit, je ne pu retenir une réplique:

- Il est physiquement possible de se sauver d'un avion qui vient de s'écraser ? Théoriquement, le risque d'explosion est forte, et ça, tu risques pas d'y échapper. Pas plus que nous. M'enfin. Pourquoi parler de choses qui n'arriveront même pas ?

Je me plongeai alors dans la contemplation du paysage à l'extérieur, sans ajouter un mot de plus, un mince sourire persistant sur mes lèvres. Bon. Je suppose que, connaissant le patron, il nous ferait rédiger un article ensemble pour que je lui montre certains trucs et l'aide à se familiariser avec tout ça ? M'ouais. Pas que ça me dérangeait. Mais j'sais pas... Elle avait l'air un peu spéciale.

Je ne relevai pas la remarque. Comme si j'étais assez bête pour croire que si on s'écrasait, j'aurais le temps de me lever et de rejoindre les portes de secours. Enfin, ça se pouvait quand même. Après tout, les crashs, ce n'était pas toujours comme avec le World Trade center. Genre. J'aurais bien aimé voir ça. Cet énorme symbole de puissance tomber. Ça aurait fait un article d'enfer. Mais bon, je n'en étais pas encore rendue au stade de l'emploi à ce moment-là.

Je sortis un calepin et un crayon et m'adonnai à un exercice auquel j'excellais: observer le peuple. Et les notes filaient sous ma plume. Déjà, je ne m'intéressais plus à Chadounet, ni à monsieur Ixe.

Pendant qu'on pouvait croire que je regardais dans le vide, perdu dans mes pensées, en réalité j'observais les alentours à ma propre façon, c'est-à-dire d'une façon des plus subtiles. Je regardais du coin de l'oeil, en gardant la tête droite, ne prenant pas la peine de la tourner dans la direction que j'observais. Je restai dans cette position quelques minutes, du moins, assez longtemps pour remarquer que Meg prenait des notes sur.. les gens. Ouain. Ça c'était étrange. Je ne comprenais pas vraiment le but.

- À quoi ça peut bien te servir ? Je veux dire... Toutes ces notes.

Je levai les yeux de mon calepin et les plantai dans les siens. Non mais, il en avait d'autres drôles de questions comme ça?

-Ça coco, c'est parce que c'est toujours pratique d'avoir plein d'adjectifs à porter de main. Pour écrire. Après, ça me sert parfois, quand j'écris des articles plus passionnants que ceux que je publiais pour mon ancienne dépêche à la noix de cajou. Plaisir personnel.

Je secouai la tête, lâchai un léger soupir et ajoutai quelques notes de plus à mon carnet.

Oh, parce qu'elle avait besoin d'observer les gens pour que les adjectifs lui viennent ? Personnellement, quand j'écrivais, les mots me venaient comme ça. Pourquoi quand elle voyait des gens et pas quand elle écrivait ses articles ? Bah. Je le savais bien aussi, qu'elle était spéciale. Je l'avais sentit. Puis ce ton familier qu'elle employait avec moi...
Quand t'as un beau brun aux yeux noisette, au sourire charmant et sympathique, qui écrit des articles tout simplement extraordinaires, t'as un peu de respect envers lui quoi. Puis tu le trouves canon alors tu te tais et tu le mates sans te gêner. Voilà quoi. Enfin, je dis - ou plutôt pense - n'importe quoi. Je me tournai pour la regarder franchement, souriant, un peu narquois.

- T'as écris des adjectifs sur moi ?

Je relevai la tête et un sourire amusé glissa sur mes lèvres. Oh, s'il voulait jouer à ce jeu-là. Ce n'était pas sa gueule d'ange - oui oui, il était vraiment smexy, mais moi, je ne bave pas - et son petit succès qui me monterait à la tête. J'suis pas une greluche moi.

-Oui bien sûr. Harcelant. Fouineur. Éphèbe. Mais ça, c'est plutôt pour mon plaisir personnel que pour ma banque de mots. Enfin, au moins, ce n'est pas trop insultant. Mais si tu veux, je peux bien l'être, déclarai-je sans trop d'émotions, excepté ce sourire.

Enfin, j'avais été assez gentille aussi. Des qualités utiles pour un journaliste. Bon, sauf éphèbe. Et encore là, ce n'est pas un adjectif, c'est un nom commun. Qui veut dire beau jeune homme. Mais lui, je l'avais placé surtout pour voir s'il allait relever ou si ce vocabulaire lui était hors de portée. J'espérais que non. Autrement, j'aurais été terriblement déçue. Et j'aurais dû rembourser mon billet d'avion au Patron.

Cette fois, mon expression se tinta d'amusement. Certes, elle était spéciale, mais drôle. Elle avait un humour particulier qui me plaisait, et je la toisai se ciller, ignorant parfaitement le patron qui faisait mine de dormir - ou dormait vraiment - entre nous deux.

- Éphèbe, ce n'est pas un adjectif, beautée. Mais je vais le prendre comme un compliment. Tu aurais aussi pu rajouter... Impavide, accort, avenant... Enfin, je dis cela pour aider à ta banque de mots, évidemment. Puis, je te permets d'être méchante. J'aime savoir ce que l'on pense de moi.

Je lui adressai le plus charmant des sourires, avec un petit air satisfait.

Pfiouf, ce n'était pas un ignare. Voilà un bon point pour lui et pour moi. Je lui souris plus... chaleureusement? Un truc comme ça. C'est trop confus dans ma tête pour que je m'en souvienne parfaitement en fait.

-Je prends bonne note de cela. T'as une bonne tête.

Je jetai un oeil au patron, apparemment endormi. Ou peut-être pas. Après, c'était louche qu'il ait un sourire en coin. Enfin. Il avait le droit de sourire dans son sommeil, naturellement. Ce n'était pas de mes oignons après tout.

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