Never let you go... (Cherry)

Je cessai de me balancer un peu brutalement, me rattrapant de justesse à la table pour ne pas tomber. Je n'étais pas choqué, non, j'avais juste besoin de réfléchir tranquillement. Vous comprenez, j'étais incapable de me concentrer sur quelque chose tout en en faisant une autre.

-Pour le jus euh...non, merci.

C'est à dire que si je me laissais aller, je pourrais bien finir la bouteille à moi seul! Et ce en deux secondes à peine, naturellement...bref, je ne souhaitais pas priver Katherina et son frère d'un bon jus frais le lendemain matin.

- D'accord...

Je rangeai le jus dans le réfrigérateur puis m'emparai de mon verre et but une gorgée. Ça rafraichissait le cerveau, ça ! Ça activait les neurones ! ... Non, je dis n'importe quoi. Bref. C'était juste une réflexion stupide, parce que, vous savez, si l'on boit trop de quelque chose de très froid en peu de temps, ça nous gèle le cerveau... Dans le sens que ça fait froid et un peu mal au niveau du front et de la tête... Enfin. Tant de réflexion sur une question aussi insensée.
Je me levai alors pour aller me changer, puisqu'on aurait sans doute plus besoin de maillot. Je me rhabillai, puis descendit et fit signe à Maxime.

- Tu vas te changer ? On va dehooors ! =D

Je m'éclipsai à nouveau dans la buanderie pour me changer, suivant les consignes de Katherina à la lettre. Une fois rhabillé, je pris le temps de rincer le short de bain, de l'essorer puis de l'étendre afin de me faire pardonner du grand frère pour cet emprunt. Bah, il pouvait comprendre, non?

Une fois tout cela méticuleusement accomplis je revins vers Katherina, la surplombant de toute ma hauteur en riant à moitié. En vérité, je n'avais jamais vraiment comparé nos tailles respectives mais là...c'était carrément fou, elle avait la taille d'une fourmi! Sans aucune gêne, je posai mon coude sur sa tête et m'y appuyai légèrement tout en regardant au loin.

-Alors capitaine, où est-ce qu'on va au juste, dehors?

Suivant le thème maritime qu'il avait employé avec le mot capitaine, je rétorquai:

- On va vers l'aventure ! Surveillez bien les alentours, vigie !

Sur ce, je me défis tout doucement de son bras sur ma tête et ouvrit la porte, le précédant à l'extérieur, et refermant la porte une fois qu'il fut sorti. Je verrouillai mais, au moment où j'allais me retourner, je découvris quelque chose qui me figea sur place.
Un petit bout de papier collé à côté de la porte. Une écriture bien trop familière dessus. Je haussai les sourcils et tirai dessus pour le décoller.
Je me tournai alors vers Maxime avec une mine... moitié surprise, moitié horrifiée. Sans même avoir lu le message.
... Pas encore !?

J'avançai instinctivement de deux pas, la main agrippée à la poignée de la porte. Cet enfoiré avait utilisé un des petits mots que nous avions -que j'avais, plutôt...- préparés à l'avance. De ma main libre, j'arrachai cet affreux bout de papier et le glissai dans la poche de mon jean. Non, finalement, je ne tenais pas à ce qu'elle le récupère. C'est pourquoi je fis l'une des choses les plus stupides de toute ma vie de mollusque sans cerveau. Je mis la boulette de papier dans ma bouche et l'avalai sans mâcher...enfin, tentai de l'avaler. Il faut dire que ça collait pas mal, et puis le goût de l'encre n'était vraiment pas fameux. Glups.

-Hum...hum!

Oui, bon, j'étais un peu en train de m'étouffer. Mais ça, je ne tenais pas vraiment à le montrer. Je voulais même carrément le cacher. Vous comprenez?

Je le regardai avec surprise mettre le papier dans sa poche, se raviser, en faire une boulette et... le mettre dans sa bouche !? J'allais lui dire d'arrêter ça et je le cracher, mais je crois qu'il était un peu trop tard. Le papier avait atteint un stade où il provoquait un étouffement. Il devait avoir décidé de se coller dans sa gorge, et il ne descendait pas plus loin. Génial... Il était vraiment con parfois ce mec ! >____<"

- Euh... ça va !?

Que faire, que faire ? Sauter pour pouvoir atteindre son dos et taper dessus ? Ahah... Je blague. Bon. Peut-être qu'avec un verre d'eau, ça passerait mieux ?

- Tu veux un truc à boire ? Tu, euh... Tousse, chais pas, fait quelque chose !!

Tousser, ça, je le faisais déjà depuis un bout de temps. En même temps...on ne peut pas dire que j'étais vraiment en train de mourir. J'avais juste l'impression très désagréable de ne plus pouvoir respirer, alors qu'en réalité je le pouvais. Mais bon, ça ne changeait rien...j'étais un peu en panique.

Et finalement, au moment où j'allais appeler ma maman en pleurant (ou pas), le papier finit par fondre complètement et je poussai un soupir de soulagement. Immense, le soupir. Il n'empêche que j'avais parfaitement réussi ma mission: maintenant, Katherina ne saurait jamais ce qu'il y avait écrit dessus.

- Woow...

Totalement soulagée moi aussi de savoir qu'il allait être correct et qu'il survivrait, je mis mes mains sur ses avants-bras et le serrai un peu.

- Mais pourquoi t'as fait ça !? T'aurais eu l'air con, de crever là !

Je secouai la tête, comme découragée, et me détachai ensuite de lui. J'aurais voulu voir ce qu'il y avait d'écrit sur le papier. Ça m'intriguait, moi ! Mais non, trop tard, il l'avait avalé. Peuuh, un jour, je me vengerai, et ma vengeance sera TERRIBLEEEE !! MWHAHAHA !! Bon, désolé. Fallait que je le dise. En fait, je suis pas méchante, donc non je ne vais pas le torturer, pour tout ceux qui ont eu peur et se sont posé des questions.

-Maaais, c'est pas de ma faute...

Je pris l'air coupable d'un petit enfant qu'on était en train de gronder. Bien sûr que c'était ma faute, mais...bon, je ne voulais pas que Katherina et moi soyons en mauvais termes à cause de cette histoire. Parce que même si faute avouée est à moitié pardonnée, je peux vous assurer qu'une fille à qui l'on annonce un truc aussi délirant que mon histoire l'était, elle vous gifle et part en courant. Ou part en courant et revient vous gifler. Et repart en courant. Bref, j'avais envie de la garder comme amie. Enfin, de devenir son ami, si possible. Vous voyez?

Parce que bon, je ne comptais plus trop pour Adam quand il s'agissait de trainer en ville sans faire de bêtises. Alors qu'avec Katherina, c'était possible, ou du moins ça en avait l'air. C'est pourquoi je la pris par les épaules -bon, ça ne rendait pas vraiment comme ça mais l'intention y était- et la menai loin de chez elle en marchant d'un pas rapide.

-Bon, dans quelle direction je dois orienter le navire, mon commandant?, fis-je malgré mon enthousiasme un tant soit peu...retombé.

Au coin de la rue, alors qu'il me posait cette question, je souris. Changement de sujet total. Mais c'était mieux comme ça. Allez, oublions cette histoire de petit papier avalé, oublions qu'il a faili y rester - c'même pas vrai... - et concentrons-nous sur la belle petite balade que nous faisions.

- À bâbord, matelos ! Ou, euh, plutôt à tribord ! Zut, je sais plus... C'quel côté déjà babord ? ... Bref, eum... Tout droit !

Bien plus simple comme ça, vous trouvez pas ?

Je titubais au rythme de ses instructions, virant à gauche, à droite, faisant demi-tour en manquant de l'écraser...jusqu'à être obligé de me rattraper à un arbre pour ne pas complètement m'étaler par terre. Finalement, la direction finale, c'est à dire droit devant, m'allait très bien.

-Bien capitaine!

Je n'avais pu m'empêcher de rire en parlant à ma "supérieure", bien que cela fut plutôt...irrespectueux. Cette fille me faisait rire, elle semblait toujours de bonne humeur, quoi qu'il puisse se passer. C'est vrai quoi, elle avait été violée la vieille, elle avait reçu un nouveau message de menaces et...

- J'suis désolée. Je suis mauvaise capitaine, j'ai failli faire couler le navire... Et à la place, on a heurté un icerberg !... Pardonne-moi !

Je ris et mis mes mains sur les siennes, qui tenaient toujours mes épaules. Il avait failli nous tuer mais bon, c'était de ma faute avec mes directives vraiment nulles. Alors qu'on marchait tranquillement en direction de... tout droit, je pointai un joli parc. Avec un petit bassin et des canards... et des arbres, et des belles fleurs !!

- On va jeter l'ancre là-bas !

- J'suis désolée. Je suis mauvaise capitaine, j'ai failli faire couler le navire... Et à la place, on a heurté un icerberg !... Pardonne-moi !

Je ris et mis mes mains sur les siennes, qui tenaient toujours mes épaules. Il avait failli nous tuer mais bon, c'était de ma faute avec mes directives vraiment nulles. Alors qu'on marchait tranquillement en direction de... tout droit, je pointai un joli parc. Avec un petit bassin et des canards... et des arbres, et des belles fleurs !!

- On va jeter l'ancre là-bas !

-Oohoo! Il me semble effectivement que les conditions soient idéalement réunies pour amarrer notre noble...barque?

Je poussai le petit portillon en fer destiné à empêcher les gamins de sortir du parc (tu parles, moi j'avais juste à lever la jambe et...bon, d'accord, y'a pas de gamins qui font 2 mètres) puis me dirigeai instinctivement vers l'une des pelouses magnifiquement entretenue. Juste assez loin des couples, des chiens et du bac à sable. Super quoi. Je m'assis -pardon, me laissai tomber comme une masse- dans l'herbe et poussai un soupir bienheureux en sentant l'herbe me chatouiller le nez. Ca, c'était autrement plus agréable qu'hier soir!

- Hum. Oui, barque.

Je contemplai avant un air assez amusé le pauvre petit portillon qu'il aurait pu enjamber si facilement. Je ne voulais pas rire de lui et de sa grandeur, mais quand même...
Je le suivis alors vers le magnifique petit coin de pelouse qu'il avait remarqué, et vers lequel il se dirigeait d'un bon pas. Avec de telles jambes, s'il se décidait à marcher vite, j'allais bien devoir courir derrière lui pour le suivre ! AH, c'est bon, c'est bon... j'arrête avec mes commentaire sur sa, euh... géantitesse ? C'était plus fort que moi... Hum. Un peu de sérieux, allons. Je me laissai choir à ses côtés et levai mon regard d'azur vers le ciel sans nuages, rejetant mes cheveux derrière mon épaule d'un geste sexy, avec beaucoup d'allure.

Je ne remarquai pas le geste de Kathrina, bien qu'il soit d'une classe internationale, trop occupé en fait à imaginer ce qui se passait à l'intérieur de mon corps. Là si ça se trouve, le bout de papier était en train de descendre leeentement le long de mon estomac, enveloppé d'une espèce de...bouillasse digestive. Et j'imaginais aussi très bien des petites bactéries gentilles pour m'aider, qui se plaignaient de mon dernier repas. Ah, pourquoi du jus d'orange et du papier dégoulinant, hein?

Je grimaçai. Sérieux, il faut arrêter de se faire des films parfois...

Par contre, de mon côté, je baissai les yeux vers lui juste à temps pour capter sa grimace. Je fus sur le point de lui poser la question, pour savoir ce qui n'allait pas, et pourquoi il faisait une telle tête, mais je me ravisai au dernier instant. Finalement, je crois que je ne voulais pas le savoir. C'était sûrement mieux ainsi.
Je souris et m'étendis sur le dos, savourant la chaleur du soleil sur ma peau, le doux toucher de l'herbe entre mes doigts. C'est bien, l'été. La nature. Le beau temps. On était pas bien, là ?

- Ça serait bien, de pouvoir rester comme ça pour toujours...

Nouvelle grimace. Enfin, froncement de sourcils. Il faut dire que moi, quand on me disait "pour toujours", je pensais tout de suite au côté pratique de la chose. Autrement dit, ne plus manger des chips et du chocolat, ni boire du pepsi, ou même aller aux toilettes...Non, décidément je ne pouvais PAS me passer de tout ça.

-Je ne suis pas certain que d'un point de vue totalement physiologique nous en soyons vraiment capables.

Ouais, c'est con. Méga con. Mais vous auriez préféré que je dise quoi aussi...un truc du genre "owai, passer l'éternité avec toi allongés dans l'herbe, c'est mon souhait le plus cher!"? Non non non, me regardez pas comme ça...j'dirai jamais ça moi. Jamais, nah!

- Je suis d'accord. Toujours signifie un peu «éternité», non ? Mais alors, et même si je restais ici jusqu'à la fin de mes jours, je vais mourir... et j'serai pas resté toujours. C'est impossible de bien des points de vue.

Je tournai la tête vers lui avec un sourire. De toute façon, j'aimais bien ça, être étendue au soleil, mais resté là à tout jamais, pas sûre que ça me tentait réellement. Je manquerais tout plein de choses passionnantes de ma vie ! ... et des choses moins passionnantes aussi. Mais bon.

- Et puis l'hiver, ce serait un peu froid... pas vrai ?

-Wai, raison de plus pour ne pas abuser de sieste dans l'herbe non plus.

Tiens, en parlant de sieste, j'avais justement comme une légère envie...c'était peut-être pas très correct, mais vraiment vital. C'est pourquoi je croisai mes mains derrière ma nuque et fermai les yeux, un sourire aux lèvres. Si ca se trouve, Katherina ne se rendrait même pas compte que j'étais en train de dormir sous ses yeux...sauf si je ronflais, bien sûr. Mais bon.

Non, en fait, elle ne s'en rendait effectivement pas compte. Elle avait elle-même fermé les yeux sous le soleil et ne bougeait plus, avec son petit sourire. Oh non, elle n'avait pas l'intention de s'endormir, mais c'était plus confortable comme ça. Voulait pas exposer ses yeux à une overdose de rayons ultraviolets qui pourraient lui causer des lésions oculaires très graves ! ... M'ouais, bref. Tout ça pour dire qu'elle avait fermé les yeux. Elle pouvait même pas voir que Maxime l'avait fait aussi, mais dans un tout autre but.

J'avais gardé de mon enfance une capacité très étrange à m'endormir dans les plus brefs délais. C'est pourquoi sombrer dans un sommeil profond ne me pris que...en fait, juste le temps de fermer mes paupières et de soupirer d'aise.

-Dodo...

Je me tournai sur le côté, cherchant à tâtons mon ours en peluche à moitié défoncé. Ouaip, je l'avais gardé, ce bon vieux doudou de mon enfance, et je dormais toujours avec! Enfin, sauf quand il y avait une fille à la maison...les plans à trois, s'pas trop mon truc. Or, ce que je trouvai à ce moment là fut le bras de Katherina. Inconscient du fait que j'étais en train de finaliser mon énième bourde de la journée, je serrai cet ours -pardon, ce bras- contre moi en frottant mon visage dans sa...euh, fourrure synthétique? Bon, on va dire que doudou était devenu chauve hein...

Au début, je le sentis prendre mon bras. Je ne réagis pas vraiment, après tout, c'était un mec. Il pouvait avoir eu une sorte de pulsion étrange, fallait pas chercher à comprendre la gente masculine après tout. Sauf qu'après, ça devint un peu bizarre. Il frottait vraiment son visage sur mon bras là ? Ouuuaiis... Il allait pas très bien dans sa tête, celui-là. Je me décidai à ouvrir les yeux pour voir la cause de cette action anormale. Et croyez-le ou non, il s'était endormir l'idiot ! Et sans doute prenait-il mon bras pour une jolie peluche quelconque, car il le serrait contre lui avec une sorte de tendresse. Si il n'avait pas été en train de me baver sur le bras, j'aurais peut-être pu trouver la scène attendrissante.

- Euh... Max ??

Je tirai un peu sur mon bras, pour le récupérer. Y'avait quand même des limites à me couvrir joyeusement de câlins et de salive !

Je grognai dans mon sommeil, pas content d'être dérangé ainsi. Il faut dire que d'habitude, mon gentil ours en peluche ne faisait rien pour s'échapper. Et il ne m'appelait pas par mon prénom, non plus. Toujours dans les vapes, je m'accrochai désespérément au doudou/bras en poussant des petits soupirs exaspérés et...un brin pathétiques. Ca cassait toujours tout, de me voir endormi...j'étais carrément plus crédible ensuite, parce que j'avais la tête d'un gamin de 5 ans faisant la sieste.

-Meeeeh!

Attention, peut-être bien que j'allais me mettre à pleurer, qui sait...Non, t'es un grand garçon Maxime, t'es un grand garçon, grrr!

- M-Mais arrête... !

Je le poussai un peu sur l'épaule, essayant de le secouer pour le réveiller. J'avais presque peur qu'il fasse une crise ou quelque chose du genre. Il semblait vraiment y tenir, à son doudou/bras. Sauf que là, on était dans un parc, il me bavait dessus et... ctait pas approprié, quoi. Surtout que bon, il était super mignon quand il dormait, mais je préférerais s'il n'avait pas pris mon bras en otage.

- Sérieux...

Je le bougeai plus fort, tirant sur mon bras, le poussant. J'avais sérieusement l'air conne, comme ça, à me débattre pour me libérer. Alors que lui... il dormait.