Pv Bridgess

J'avais équartillé les yeux en voyant l'arme pointé sur moi,
puis m'étais calmée en voyant qu'il n'avait peut-être pas l'intention
de me tuer. Je tassa l'arme du revers de la mainet ramassa mon panier
de fruits que j'avais laissé tombé par terre, avant de me relever pour
toiser l'homme.

- Pouquoi me donnez-vous toutes ces informations si je mérite
de mourir?

- Parce que j'estime que vous avez le droit de vivre, dis-je en baissant un peu la voix pour ne pas risquer d'être entendu par quelqu'un d'autre. Ne voulant pas être prit en train de discuter avec elle, je me détournai un peu, prêt à m'en aller.
- S'il vous plait, jurez-moi que vous allez faire attention, fräulein...

Je fronçai les sourcils, confuse.

- Je.. Oui, mais pourquoi m'avertir moi
alors qu'un tas de gens comme moi circule encore ici, dans
le ghetto?

Je m'avançai pour qu'il ne s'en aille pas tout de suite.

- Je suis un Allemand. Un soldat Allemand. Je ne peux pas me promener dans les rues en criant aux gens de s'enfuir...
Je la regardai de mes beaux yeux bleus. J'étais plutôt beau, à vrai dire. Très beau, même. J'avais un visage grave et sérieux, mais c'est ça qui faisait mon charme. J'étais grand et assez costaud, en plus de mes cheveux courts couleur de blé et mes yeux bleus ciel. Je dégageais un certain charme. Je me rapprochai un peu d'elle et me penchai pour pouvoir lui parler encore plus bas:
- Je fais ce que je peux, vous savez... Si je ne suis pas obligé de tirer sur quelqu'un, je ne le fais pas. Si j'ai la chance de sauver des gens, tant mieux. Mais je ne peux pas faire de miracles, et si jamais Hitler apprenait ce que je fais...

Je rougis en voyant la proximité
de nos visages.

- Eh bien... Merci?

Mon reard se perdit dans l'océan de ses yeux bleus
et pendant un moment, je perdis la notion du temps
et me demandai s'il me trouvait jolie.
Je secouai la tête. Mais bon sang, c'était un Allemand!

Je restai ainsi un moment puis réussit enfin à articuler, d'un ton presque suppliant:
- Restez en vie, Fräulein. Cachez vous, évitez les Allemands. Je veux vous revoir en vie demain matin.
Comme j'entendais au loin le bruit du camion allemand, je me reculai et lui fit signe de déguerpir au plus vite.

J'aurais voulu le remercier, pour de vrai cette fois-ci,
mais le camion s'en venait et le jeune homme était partit.
Je me mis à courir sans direction précise, entendant derrière moi
des cris et des supplications et même quelques coups de fusils.
Je me réfugiai plus loin, hors de porté des nazis et les larmes
ruisselaient sur mes joues pendant que je me bouchai les oreilles
pour ne pas entendre ces plaintes de désespoir.

J'allai rejoindre les autres, mais cette fois je ne pu rien faire. Il y avait une vingtaine d'Allemands, je ne pouvais pas prendre de chance.
- Hé, Hans ! Il y avait du monde dans ton coin?
- Personne. J'ai fait le tour de l'immeuble, j'ai observé partout, et c'était complètement désert, répondis-je aussitôt.
Un gamin passa devant moi. Ses vêtements étaient en lambeaux, et il était si maigre qu'on voyait presque ses os. Il monta avec difficulté dans le camion, laissant tomber un nounours en mauvais état. Il tendit le bras pour le ravoir, mais un Nazi repoussa sa main. Je soupirai, me penchai pour ramasser la peluche et la tendit au garçon.
- Qu'on la lui laisse ou non, ça ne change rien... expliquai-je aux autres en voyant leur expression.
Ils approuvèrent d'un signe de tête, et continuèrent de faire monter les Juifs. Soudain, un soldat lança une grenade par la fenêtre ouverte d'un immeuble. Il y eut une grosse explosion, et le bâtiment prit feu. Il y avait des cris qui montaient de partout dans le ghetto. Tout ceux qui restaient étaient complètement terrorisés et faisaient tout pour sauver leur peau. Le camion remplit, je montai avec les autres en direction de l'endroit où les Juifs prendraient le train. Ils avaient besoin de moi pour aider là-bas pour aujourd'hui.

Je sortis de ma cachette une fois le
camion partit. Le feu ravageait les dernière installation
et des gens avaient été blessés gravement.
Je pleurai de plus bel me disant que s'il avait sû ce qu'il
allait se passé comme moi, ils auraient pu sauver leur
peau. Une femme criait sa souffrance en tenant son nouveau-né dans les bras. Je ne le regarda pas, ne voulant pas voir ce pourquoi la femme pleurait.

Une fois rendu là-bas, je me postai près du train et regardai les Juifs former des rangées, être divisés en groupes et embarquer dans le train. Je m'assurais que personne ne poussait ou ne cherchait à se sauver. Ça me frustrait de ne pouvoir rien faire pour eux, mais j'étais rassuré de savoir la jeune Juive bien à l'abri au ghetto. Enfin, bien à l'abri... On ne peut pas vraiment dire ça, mais c'est toujours mieux qu'ici. Soudain, un Allemand cria:
- Attention soldats ! Le chef est là!
Je me redressai aussitôt, la tête bien haute, et tout le monde en fit de même. Les visites d'Hitler ici étaient plutôt rares. Lorsqu'il passa devant moi, il me toisa longuement et me sourit. Sourire que je lui rendis. Je savais pourquoi il souriait ainsi: J'avais LE physique parfait. Il continua son chemin, et passa à côté d'un vieux Juif qui tomba soudain, raide mort, sans que personne ne lui touche. Son coeur l'avait lâché... Hitler nous ordonna de reprendre le travail, ce que nous fîmes sans tarder. Bientôt, tout le monde fut entassé dans les trains, et hop, un petit voyage gratuit vers la mort.

J'aidai les plus jeunes en les confia
aux adultes qui restaient. Quelques personnes
avaient été touché par des balles ou des débris lors de l'explosion,
mais nous ne pouvions rien faire pour eux à présent.
Toute notre matinée fût consacrée à essayer de construire
des petits camps à l'aide des débrits restants.
Les aînés ne voulaient pas quitter le ghetto et quelques
Juifs étaient déjà partit.

Lorsque le camion repassa dans les rues du ghetto, le soir, je demandai à être débarqué ici. Ils s'arrêtèrent, et je sautai en bas, les saluant ensuite d'un signe de la main. L'un d'eux leva soudain son arme, mais on n'y voyait pas très bien dans le noir et l'autre Nazi avait déjà redémarré le camion. Lorsqu'ils furent hors de vue, je me précipitai vers le petit camp que mon compagnon avait visé un peu plus tôt. Tout le monde se figea en me voyant arriver, mais je ne me préoccupai pas d'eux. Je ne cherchais qu'une seule personne, que je ne voyais malheureusement pas. Je commençais déjà à craindre le pire...

Je me promenais dans le noir, mes habits étaient
déchirés et j'avais vraiment froid. Je tenais un nouveau-né dans
les bras, sur le point d'aller le porter à un adulte.
J'étais épuisée et je n'avais pas mangé depuis deux jours.

- Ça va aller, shhhhht... dis-je au bébé qui s'était mis à pleurer.

Je reconnus aussitôt la voix, pas trop loin, un peu étouffée par les pleurs du bébé. Je me précipitai aussitôt par là, sans réfléchir, sans prendre le temps de penser aux conséquences de ce geste. Et je la vit. Encore bien vivante, quoi que dans un état lamentable. Elle devait geler dans le froid de la nuit, et elle me semblait si maigre que s'en était troublant. En moins de deux je fus à ses côtés, hésitant entre la folle envie de la serrer dans mes bras et l'idée plus intelligente de rester calmement debout à ses côtés. J'optai pour la deuxième option.
- Vous êtes encore vivante...
Ce fut tout ce que je trouvai à dire. Je ne pouvais rien dire d'autre. Il m'était impossible d'avoir que j'avais eu peur pour elle. Se serait trahir les miens. Mais les Nazis valaient-ils la peine que je leur reste fidèle? La réponse m'apparut très simple et claire: Non.
Mes traits trahissaient mon inquiétude, la lumière de la lune éclairait à peine mon visage, mais mes yeux semblaient briller doucement dans l'obscurité.

Je sursautai et serra l'enfant dans mes bras.

- Que faites-vous ici? Le couvre-feu est passé...

Je me se rapprochai de lui, l'inquiétude se lisant dans mes
yeux. ''Vous êtes encore vivante...'' Avait-il dit ça, car
il était déçu que je le sois ou...

- Je pourrais vous poser la même question. Le couvre-feu est dangeureux pour vous, pas pour moi...
Je la regardai se rapprocher, mon regard se posa sur l'enfant qu'elle tenait dans ses bras et je demandai doucement:
- Il a perdu sa famille...?

- Oui, j'essayais d'aller le porter à des gens qui habitent...

Je me tût, me disant que s'il savait
leur cachette, peut-être emmenerait-il sa troupe pour
les tuer.

Je soupira finalement.

- Derrière les ruines, dis-je en espérant pouvoir lui faire confiance.

Je venais peut-être de conduire les survivants à la mort.

J'hochai un peu la tête. L'idée de débarquer dans la cachette avec d'autres soldats m'effleura à peine l'esprit, et je la chassai d'ailleurs aussitôt. Sans plus attendre, je refermai mes doigts sur les siens et la tirai avec moi. Je suivis une série de maisons encore debout, restant toujours dans l'ombre. Rapidement, on arriva aux ruines. Je m'arrêtai à une certaine distance du campement, et murmurai:
- Je ne vais pas plus loin. Je vais générer la panique totale, et je ne veux pas que les gens perdent la confiance qu'ils ont en vous parce que vous ramenez un Allemand.

J'haussai les sourcils, surprise, puis sans plus
attendre alla porter l'enfant aux adultes.
Ceux-ci me demandèrent si je resterais avec eux pour la
nuit, car ils avaient des couvertures, mais je déclinai l'offre
en retournant à l'endroit où l'Allemand était resté.

Je m'étais assit et regardait dans le vide en buvant tranquillement un peu d'eau. Je me demandais ce que je faisais là. Je ne m'attendais pas à ce qu'elle revienne, après tout, j'étais allemand. Lorsque je la vis revenir vers moi, je souris. Un vrai, beau sourire sincère. Lorsqu'elle fut un peu plus près, je lui tendis ma gourde encore presque pleine, sans un mot.

J'hésitai un instant, puis la prit sans réfléchir,
je mourais de soif.
Après avoir laissé un peu d'eau dans la gourde, par politesse,
je la rendis à son propriétaire et le toisa longuement.

- Merci pour tout..

Je repris la gourde et regardai la jeune fille dans les yeux avec un petit sourire.
- De rien.
Je gardai le silence un bon moment, ne faisant que la regarder, attendant qu'elle dise quelque chose. Le silence s'éternisait entre nous, et pour le briser, je sortis du pain de mon sac, lui donnai un bon gros morceau et mangeai le petit bout qu'il restait.

Je pris le morceau, mais ne le porta pas tout de suite
à ma bouche.

- Vous savez, je ne crois pas que cela soit une bonne idée
ce que vous faites. Si quelqu'un vous voyait, vous seriez répimandé.

''Et moi tuée'' pensais-je simplement.

- Je sais... Mais je suis prêt à courir le risque. Et pour le moment, personne ne risque de nous voir. De toute façon, je préfèrerais être puni et vous savoir en meilleure santé que de continuer tranquillement à tuer des gens pendant que vous mourrez de faim, de soif, de froid...
Je semblais très sincère. Je finis mon morceau de pain et baissai un peu la tête, regardant le sol à mes pieds.

Je rougis devant ce qu'il venait de dire.
Cet Allemand avait un coeur.

- Puis-je connaître votre nom?