Crazy clown [libre ]

- Ah. Il se sont faits canardés.

Le jeune homme ferma en hâte le rideau rouge, entre les cris et les plaintes. Lui, c'était un employé de l'établissement, qui s'occupait principalement d'ouvrir et fermer le rideau, et du ménage à la fin de la journée. Qui aurait cru que cette petite troupe qui avait l'air honnête au premier abord... Qui aurait cru qu'ils s'agissait de petits voleurs ? Au final, c'était marrant. Puis lui, il s'en foutait royal, on lui avait rien piqué. Il l'aurait vu, sinon. Quand même, c'est vachement mieux d'être employé que spectateur.

La soirée interrompue, il décida de s'éclipser. Dans ces moments-là, vaut mieux pas être présents pour voir le patron grogner. Il sortit donc dans son vêtement de travail, passant par la porte de sortie des salariés, qui servait d'entrée des artistes. Une clope. Voué. Bonne idée. Il chopa son paquet dans le fond de sa poche, coinça le filtre entre ses lèvres fines, et se rendit dans la petite ruelle. Le seuil était couvert de mégots, les siens. Il venait là à ses pauses, s'asseyait sur la benne à ordures, et comptait les fissures qui tapissaient le crépi d'en face. Et alors qu'il s'engageait dans l'endroit, il se cogna contre quelqu'un. Un quelqu'un drôlement déguisé. La bouffonne aux clochettes.

Il prit le temps de se remettre de ses émotions, échangea un regard avec chaque membre de la troupe. Il s'attarda sur le sac visiblement plein, puis pointa distraitement la rue qui se trouvait derrière lui.

- Vous feriez mieux de filer fissa, ils vont commencer à essayer de vous poursuivre.

Il ne comprit pas tout. Il leur dit de se tirer, et eux, ils tardent. Et en plus, on lui pokait la joue sans permission. Ah non. Être gentil, il voulait bien, mais fallait pas traîner, là, les gars ! Non, non, pas bien du tout. Puis, il voulait pas vraiment être pris par son patron en train de sympathiser avec les voleurs. Pas qu'il tenait tout particulièrement à son travail, mais. Il avait un chat, à nourrir ! Et ça bouffe, ces sales bêtes. Cependant, il n'en dit rien, et se contenta de répondre à la question posée. Il ouvrit grand la bouche, laissant tomber à terre sa cigarette, et mordit gentiment les doigts de la demoiselle. Vàlà. Oui, ça mord.

Cependant, il avait vu la corde, et ne souhaitant pas être agressé, il décida d'aller se cacher. Il se recroquevilla donc... derrière la petit ange blond qui avait poussé la chansonnette auparavant. Il mis un moment, avant de remarquer que son bouclier humain n'était qu'une fillette. Une fillette douée, cela dit. Et il TENAIT à la féliciter.

- Ouh, mais t'es la p'tite chanteuse ! Tu me signerais un autographe, avec tes collègues. Quand vous serait célèbres, j'pourrais le revendre à prix d'or !

Quoi ? Elle allaient sûrement devenir riches et célèbres, ces trois-là. Si il pouvait s'y faire un peu d'argent... Pour nourrir son chat, bien évidemment.

Le magicien avait dit que c'était correct. Alors rien n'était dangereux. La gamine se rapprocha de ses clones, subtilement, juste pour faire un peu plus de place. Elle n'avait pas peur. Bientôt, ils seraient tous très loin d'ici et ils auraient droit à un bon goûter. D'ailleurs, peut-être que ça serait quelque chose qu'ils n'avaient pas mangé depuis longtemps qui sait. Elle était bien trop occupée à y penser pour porter attention aux simagrées de la bouffone si agile de ses mains. Alors, quand le type des rideaux lui adressa la parole, elle figea quelques instants, surprises.

Elle leva finalement la tête vers le type, le trouvant un peu étrange. D'ailleurs, c'était une drôle de question. Signature... Elle ne savait même pas écrire. Elle regarda ses compagnons, l'air indécise, puis reposa ses yeux opalins sur le garçon. Elle aurait préféré qu'il continue de jouer avec la bouffonne.

- Je ne sais pas écrire, lâcha-t-elle finalement.

Elle le fixa un peu et haussa les épaules avant d'aller se ranger à la droite du magicien. Elle avait envie de lui demander quelque chose, mais elle se retenait. C'était trop stupide en fait.