Sunday, Bloody Sunday

Nath,
Mon amour, ma vie, ma douce, mon ange, ma lumière, mon espoir, mon coeur, ma belle...
Je ne sais pas comment t'expliquer ce que je m'apprête à faire. Je sais que tu auras des milliers de questions sur le bout des lèvres. Une reviendra plus souvent que les autres. «Pourquoi?».
Pourquoi... Je ne le sais pas et je le sais à la fois. C'est compliqué. Tu te souviens de ces choses que l'on essayait de s'expliquer parfois, ces sentiments enfouis au plus profond de nous que seuls les enfants maltraités pouvaient comprendre ? On tentait de trouver des mots pour expliquer. On en trouvait parfois, mais jamais les mots justes, les mots assez forts. Alors là, on se contentait de dire «Tu sais bien ce que je veux dire...».
Cette fois-ci, Nath, je voudrais bien trouver les mots. Je te le jure, je le voudrais vraiment. Le problème, vois-tu, c'est que c'est un concept qu'il n'y a que moi qui comprenne. C'est égoïste, je sais, mais c'est véridique. Je pourrais bien tenter de trouver les mots pour te l'expliquer, mais tu ne pourrais pas comprendre. Comme les autres ne comprenaient pas ce que nous l'on tentait de leur expliquer.
Je t'ai aimé dès la première fois où je t'ai vu, dans le gymnase, en secondaire un, alors que les autres se tournaient vers moi au lieu de toi pour achaler. Tu t'en souviens sans doute aussi. Tu avais l'air apeuré... Mais si sur de toi à la fois. Ça m'a réchauffé le coeur. Vraiment. J'étais... Je me sentais bien. Un peu en sécurité.
C'étiat malsain de t'aimer comme cela. Je me suis accroché à toi comme à une bouée de sauvetage. Tu en as fait de même. Nous n'aurions pas du. Comment pouvais-je te sauver alors que j'étais incapable de me sauver moi-même ? Comment pouvais-je te donner le sourire alors que le mien était disparu depuis des années ? Comment pouvais-je t'aimer comme il le fallait alors que je ne m'étais jamais aimé ?...
Tu comprends, maintenant ? Je ne dis pas que je ne t'aimais pas, non, ce n'est pas du tout la chose. Mais je t'aimais mal. Toi, tu ne le savais peut-être pas, tu ne le sentais peut-être pas mais moi, si. Je ne pouvais plus le vivre. Ce n'était pas ma place. C'était la place de quelqu'un d'autre que j'avais prise parce que j'en avais besoin. Égoïstement, à nouveau.
Tu avais dans ton regard quelque chose que personne d'autre n'avait. Une drôle de flamme, de lueur : l'envie de vivre. Pour toi, pas pour personne d'autre. Les autres n'ont plus cette envie : il vivent parce qu'il faut vivre, c'est normal. Moi, je n'avais plus l'envie ni le devoir de vivre. Je n'avais plus rien de la vie, seulement son apparence. Je vivais et j'étais mort en dedans. On ne réssucite pas les morts. J'ai essayé de me réssucité grâce aux miracles que tu faisais chez moi. Mais rien ne pouvait me sauver. J'étais déjà noyé depuis longtemps.
Ne t'en veux pas, Nath. Ce n'était pas ta faute. Je sais que tu voulais me garder longtemps, toujours avec toi. Je n'aurais jamais refusé si c'était bien. Mais c'était mal. Ce n'était pas ma place.
Je sais qu'il existe quelque part dans le monde quelqu'un pour toi. Quelqu'un qui aura également cette lueur d'envie de vivre dans le regard, quelqu'un qui t'aimeras sainement et qui sera pour toi encore mieux que moi. Je le sais. Quelqu'un qui réalisera tous tes rêves au péril des siens. Quelqu'un qui saura voir en toi aussi bien que j'ai su voir en toi, peut-être même mieux. Quelqu'un à qui tu pourras dire des «Tu sais bien ce que je veux dire» et qui, réellement, sauras. Ce quelqu'un, Nathalie, il est là pour toi, quelque part. Et je sais que ce n'est pas là.
Ma course dans ce parcours vital est fini depuis longtemps. J'essaie de courir à contre courant pour la recommencer mais rien n'y fait. Je suis parti depuis longtemps. Je l'accepte aujourd'hui. Je suis désolé de ne pas avoir su te le dire avant. T'expliquer. Je suis vraiment désolé...
Sois heureuse, ma belle. Sèche tes pleurs, jolie Nathalie, vis pour moi, vis pour deux. Je t'aime de tout mon âme déjà pourrie jusqu'à la moelle. Je t'aime, je t'aime, je t'aime, je t'aime mal mais je t'aime. D'ici quelques dizaines d'années, j'aurai appris à mieux t'aimer et je t'accueillerai à bras ouverts au paradis. Mais seulement quand le temps viendra.
Oh, et j'accepterai avec joie ton nouvel amoureux. Je suis convaincu que, malgré tout, on s'entendra bien ensemble.
N'oublie pas la promesse que tu m'as fait il y a quelques jours : vis ta vie comme si tout était possible et réalise tes rêves.
À bientôt (pour moi) et à dans un siècle (pour toi).
Mike, Michaël.